Cette historiette écrite il y a longtemps aurait pu servir d'introduction à une saga. J'aime l'exagération baroque qu'octroie la forme du conte. Tout est permis, même de laisser un Roi assis sur son trône de longues années sous la poussière.
Il était une fois un roi très puissant qui s’ennuyait à mourir dans son vaste château.
Il passait ses journées assis sur son trône, le menton appuyé sur sa main droite, le regard perdu dans les immenses bannières poussérieuses qui lui rappelaient ses anciennes conquêtes.
Ce roi ne savait plus que faire, car il avait tout fait. Passant sa jeunesse à guerroyer, il avait repoussé, puis vaincu tous ses adversaires. Puis il s’était mis à annexer, et mettre de l’ordre dans ses nombreuses provinces. Il avait donné à l’ensemble le nom d’Empire et s’était fait forger une couronne en conséquence. Puis il avait passé en revue ses armées. Il les a lancées dans les terres inconnues, jusqu’au bout de la neige éternelle, ou du sable brûlant, des forêts antiques et des jongles exubérantes.
Mais partout, elles rencontraient la victolre, ce qui au bout d’un certain temps lassa le roi. Puis vint un jour où il n’y eut plus rien à conquérir. Les armées parties de l’Ouest revinrent par l’Est, et vice-versa. Le roi dès lors s’ennuya ferme.
Et il se mit à réfléchir. Longtemps.
Un beau jour, il se leva de son trône, brusquement, en secouant la poussière qui recouvrait sa cape.
Alors il appela son plus grands vassal, le plus puissant des puissants du royaume, ancien maître des armées de l’Empire du roi.
Le grand connétable vint immédiatement, et en entrant dans la majestueuse salle, dans un bruit de talon ferré, il se prosterna devant son suzerain. A sa grande surprise, des gardes royaux l’empoignèrent et le relevèrent de force face au roi. Celui-ci, l’air sévère et redoutable, descendit d’un pas rapide les marches qui le séparaient du connétable, et s’approchant, lui prit son épée, et la lança violemment sur le sol.
Puis répondant à un signe du suzerain, un héraut se rapprocha et proclama de vive voix la déchéance du connétable, qui, accusé de trahison, perdait en cet instant ses terres, sa famille, son honneur et son château. Enfin il fut chassé du palais, comme le plus simple des manants, avec sentence d’exil.
Exil ? Mais quel lieu pouvait donc le recevoir, lui, le connétable, injustement accusé et traîné dans la fange, puisque le monde entier appartenait au roi ?
L’ancien général qui avait servi si fidèlement son maître durant tant d’année, le coeur saignant de l’affront que ce dernier lui avait fait sans juste cause leva son poing en jurant de revenir à la tête d’une armée, raser cette orgueilleuse forteresse.
Ses paroles retentirent jusque dans la salle du trône et le roi, debout près d’une fenêtre, sourit de satisfaction, sachant qu’il s’était enfin trouvé un ennemi à combattre, sachant qu’il allait enfin sortir de son ennui et revêtir pour de bon son armure de guerre.
la chute est bien trouvée ^^